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Virage numérique : la stratégie ambitieuse du CHU Amiens-Picardie


Rédigé par Joëlle HAYEK le Mardi 10 Janvier 2023 à 13:36 | Lu 2438 fois


Avec 1 705 lits et places, le CHU Amiens-Picardie – l’un des deux établissements hospitalo-universitaires de référence dans les Hauts-de-France – dessert un territoire de 630 000 habitants. Attaché à tirer pleinement profit des dernières avancées technologiques au bénéfice de ses salariés et usagers, il porte notamment une stratégie numérique ambitieuse, que nous découvrons avec Sébastien Florek, son Directeur des Services Numériques.



Sébastien Florek, Directeur des Services Numériques du CHU Amiens-Picardie. ©CHU Amiens-Picardie
Sébastien Florek, Directeur des Services Numériques du CHU Amiens-Picardie. ©CHU Amiens-Picardie
Pourquoi le CHU Amiens Picardie a-t-il créé une Direction des Services Numériques plutôt qu’une Direction des Systèmes d’Information ?
Sébastien Florek : Cet intitulé permet de matérialiser la fracture, désormais de plus en plus perceptible, entre notre métier initial, essentiellement axé sur le volet technique, et notre rôle actuel, qui consiste à apporter de nouvelles fonctionnalités sources de valeur, pour les professionnels de l’établissement comme pour les usagers. Cette tendance de fond, qui fait écho à la stratégie nationale du numérique en santé, prend forme à travers un Schéma directeur des Systèmes d’Information (SDSI) articulé autour de six axes : les exigences règlementaires, la convergence à l’échelle du Groupement Hospitalier de Territoire (GHT) Somme-Littoral Sud, dont nous sommes l’établissement support, l’échange et le partage de documents médicaux, la dématérialisation, la recherche et l’innovation, et enfin la cybersécurité.
 
Que recouvre par exemple l’axe relatif aux exigences règlementaires ?
Comme vous le savez, il nous incombe de mettre en œuvre, dans des délais courts, les attendus des différents programmes nationaux, et plus particulièrement les exigences de la feuille de route du numérique en santé ainsi que les nouvelles obligations issues du Ségur Numérique. Pour relever ce défi, des subventions sont allouées par les pouvoirs publics à travers un dispositif de financement à l’usage. Le CHU Amiens-Picardie a donc adopté ici une stratégie proactive, et met tout en œuvre pour atteindre les cibles d’usage dans les délais requis. Ces actions vont permettre aux autres établissements du GHT de bénéficier directement des avancées technologiques.
 
Quid de vos travaux sur la convergence des systèmes d’information à l’échelle du GHT ?
Nous œuvrons aujourd’hui à construire des fondations solides, qui servent déjà de socle aux premières applications communes. Nous avons ainsi travaillé sur l’interconnexion sécurisée des réseaux et l’homogénéisation des équipements de sécurité, mais aussi sur l’unification du logiciel de pilotage des automates de laboratoires. Nous avons également entamé le déploiement progressif d’un dossier patient informatisé (DPI) unique et multi-entités juridiques, qui représente in fine la brique la plus importante de la stratégie, du fait que toutes les autres applications y sont mécaniquement rattachées. Cela dit, la convergence des outils métiers est loin d’être simple, les Systèmes d’Information devenant de plus en plus complexes. 
 
Pourquoi donc ?
D’une part, nous pouvons difficilement dupliquer partout le mode de fonctionnement du CHU : bien que nous partagions tous un canevas et des objectifs communs, chaque établissement a des spécificités qui lui sont propres, dont il nous faut tenir compte. C’est une première difficulté. Sur un autre registre, nous sommes aujourd’hui dans une phase intermédiaire, où il nous faut à la fois gérer les nouvelles applications communes et maintenir en conditions opérationnelles les systèmes d’information locaux. Ce double défi n'est pas sans impact sur nos organisations, qui doivent s’adapter pour que nous puissions consolider et poursuivre cette dynamique.
 
Cette convergence viendra appuyer l’échange et le partage des documents médicaux, votre troisième grand axe. Quels projets avez-vous déjà menés en ce sens ?
Nous travaillons sur deux volets complémentaires, les échanges inter et intra-GHT. Nous nous appuyons notamment ici sur la plateforme régionale Prédice, déjà mise en production en imagerie médicale. Nous avons ainsi pu déployer une solution de téléradiologie au bénéfice des autres établissements du GHT, mais aussi renforcer nos échanges avec les autres centres hospitaliers de la région Hauts-de-France dans le cadre de la continuité des soins.
 
Vous avez également cité la dématérialisation. Pourriez-vous nous en parler ?
Nous avons notamment mis en œuvre ici un projet innovant inscrit dans une démarche de développement durable : limiter les impressions inutiles, favoriser les impressions recto verso ainsi que noir et blanc. Un système global basé sur une imprimante virtuelle unique par défaut permet de récupérer les documents sur n’importe quel copieur grâce au badge professionnel. Autre projet notable, la numérisation avec valeur probante de nos archives papier et l’accès aux documents scannés directement à partir du DPI, qui fera l’objet d’une expérimentation pilote début 2023. Citons également la mise en œuvre de la prescription connectée, effective depuis quelques mois pour les examens d’imagerie médicale, et qui devrait également concerner la biologie, d’ici deux à trois ans, le temps du déploiement du nouveau système de gestion du laboratoire.
 
Évoquons à présent l’axe recherche et innovation, qui a également vu le CHU Amiens-Picardie multiplier les initiatives…
Nous avons répondu à l’appel à projets national pour soutenir le financement de notre projet de mise en réseau de notre entrepôt de données de santé (EDS), en partenariat avec les autres établissements du collectif G4, c’est-à-dire avec les CHU de Caen, Lille et Rouen. Nous comptons en effet pouvoir mener ensemble des études multicentriques. Dans un autre registre, nous effectuons une veille régulière des dernières innovations numériques, pour notamment privilégier les applications modernes, ergonomiques et qui tiennent compte de l’expérience utilisateur. C’est ainsi que nous avons introduit un système de géoguidage interne fin 2021 et, plus récemment, un portail de préadmission pour les patients ainsi qu’une plateforme d’échanges pour le personnel avec la DRH.
 
Vous accordez, pour finir, une attention forte à la cybersécurité, qui fait l’objet d’un volet dédié. Que pourriez-vous nous en dire ?
Les établissements de santé sont en effet vulnérables aux attaques, ce qui nous impose de muscler en continu la sécurité de nos infrastructures et nos applicatifs, tout en sensibilisant régulièrement les utilisateurs aux bonnes pratiques de cybersécurité. Travaillant en lien étroit avec le RSSI du CHU, nous mettons notamment en application les différentes exigences règlementaires et les préconisations de l’ANSSI. Nous avons également déployé un SOC, un système de supervision informatique pour pouvoir réagir rapidement en cas d’alerte. Mais le risque zéro n’existe pas.  Nous sommes également préparés à l’éventualité d’une attaque, afin de maintenir la continuité de l’activité en mode dégradé.
 
Le mot de la fin ?
Nous avons évoqué principalement le SDSI du CHU Amiens-Picardie, mais celui-ci recoupe le SDSI du GHT Somme-Littoral Sud, pour porter collectivement un projet cohérent et préparer la mise en place, à terme, d’une direction des services numériques mutualisée. Il nous faut donc anticiper cette mutualisation dès à présent et mettre en œuvre les organisations intermédiaires adéquates. C’est un travail de longue haleine, que nous menons de manière collégiale afin que tous les établissements du groupement trouvent des réponses à leurs besoins et attentes.

Article publié dans l'édition de décembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.
 






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