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Quels futurs enjeux pour la médecine de précision ?


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Lundi 14 Mars 2022 à 09:56 | Lu 2067 fois


Le Campus Santé de Rouen accueillera les 24 et 25 mars prochains la deuxième édition du Pathways to Precision Medicine (P2M) Symposium. Soutenu par l’UFR Santé et le CHU de Rouen, l’événement réunira des pointures internationales dans les différents domaines d'expertise de la médecine de précision, comme nous l’explique le Professeur Soumeya Bekri, co-fondatrice du symposium et experte en médecine de précision et intelligence artificielle.



Le Pr Soumeya Bekri, co-fondatrice du symposium P2M et experte en médecine de précision et intelligence artificielle. ©DR
Le Pr Soumeya Bekri, co-fondatrice du symposium P2M et experte en médecine de précision et intelligence artificielle. ©DR
Cheffe de service du Laboratoire de biochimie métabolique, vous vous intéressez de longue date aux innovations et plus particulièrement à l’essor du numérique en santé. Pourquoi ?
Pr Soumeya Bekri : Le Laboratoire de biochimie métabolique du CHU de Rouen a en charge le suivi et le diagnostic des maladies rares, et notamment des maladies héréditaires du métabolisme. Pour remplir au mieux mes missions, je me suis intéressée, depuis une dizaine d’années, aux usages numériques en médecine, et plus largement à l’apport des mathématiques et de l’informatique. J’ai également cherché à compléter mes équipes, en recrutant des personnes qui, outre leur formation médicale, ont une appétence particulière pour l’informatique. C’est justement le profil du Dr Abdellah Tebani, qui s’intéresse notamment à l’analyse de donnée, les big data ou encore l’IA. Une fois recruté, il est d’ailleurs parti parfaire sa formation en Suède, dans un institut spécialisé en médecine de précision.

En quoi consiste, plus concrètement, la médecine de précision ?
Celle-ci repose sur quatre piliers : la personnalisation, la prévention, la prédiction et la participation. Elle analyse les données issues d’un écosystème pour améliorer la prise en charge de la population. La médecine de précision n’est donc pas une médecine futuriste, mais désigne bel et bien la médecine d’aujourd’hui, complétée par l’apport de l’analyse de données et des technologies d’exploration avancées – à l’instar, par exemple, de celles utilisées dans les laboratoires de biologie ou les services d’imagerie. Ces technologies génèrent un important volume de données pour chaque patient. Nous avons besoin de nouvelles compétences pour pouvoir mieux les exploiter, de manière à en extraire les informations importantes et les appliquer au patient.

Quelle est ici la place de l’intelligence artificielle ?
On l’a vu, les avancées technologiques actuelles démultiplient les volumes de données disponibles. Pour les traiter, il nous faut des outils situés à la croisée du numérique et des mathématiques comme, justement, l’intelligence artificielle ou la modélisation informatique, qui doivent désormais faire partie intégrante des activités cliniques. Accompagner cette transition au cœur de la médecine de demain nécessite donc une évolution indispensable sur le plan des compétences et de la formation. Bien entendu, nous aurons toujours besoin des professionnels de santé actuels, mais il nous faut également inventer de nouveaux métiers, comme les bio-informaticiens qui seront à l’avenir présents au quotidien dans les services cliniques.

Vous avez créé le symposium P2M en 2019. Pourquoi cet événement ?
En 2014, j’avais été auditionnée par l’Assemblée nationale dans le cadre d’une commission chargée de réfléchir au développement de la médecine de précision en France. Des députés m’avaient alors interrogé sur la première action qu’il me semblait nécessaire de mener en ce sens. J’avais évoqué la formation et l’enseignement, qui représentent à mes yeux le principal vecteur de changement. Pourtant, force est de constater qu’aujourd’hui la grande majorité des professionnels de santé n’est pas prête pour cette révolution technologique. Il nous faut mieux préparer ce virage, penser son impact et accompagner le changement, qui sont autant d’éléments essentiels pour que chacun s’approprie ces nouvelles technologies. L’idée d’un symposium s’est donc tout naturellement imposée pour que les acteurs de santé puissent justement mieux faire face à ces évolutions.
 

Pourquoi avoir dès le départ souhaité faire de ce symposium un événement international ?
Nous voulons accueillir des experts, quel que soit leur lieu d’exercice, pour faire découvrir les travaux de ceux qui pratiquent la médecine de précision au quotidien. Ces témoignages variés montrent ainsi à tous que cette médecine n’est pas futuriste, qu’elle est déjà une réalité. En résumé, qu’elle est possible. Surtout, en multipliant les cas d’usage, on met en lumière la sous-exploitation actuelle des données disponibles dans les dossiers patients, et la nécessité d’utiliser des outils qui permettront de mieux les analyser.

Après une première édition en 2019, vous organisez un nouvel opus les 23 et 24 mars prochains…
La première édition du symposium P2M ayant beaucoup plu, la demande étant grande pour une deuxième édition. Notre doyen, notamment, nous a beaucoup épaulés et encouragés pour organiser cette édition 2022 qui, comme la précédente, s’adressera à tous, y compris les jeunes praticiens, quelle que soit leur spécialité. La santé impose une approche pluridisciplinaire et collective. Le Covid nous l’a encore récemment démontré : nous avons besoin des compétences de tous. Et cela sera encore plus vrai à l’avenir, puisqu’il faudra compter sur les métiers actuels, mais aussi sur ceux que l’on n’imagine pas encore aujourd’hui, bien qu’ils seront sans doute indispensables demain. Notre rôle est de préparer les nouvelles générations : il ne s’agit pas de former des informaticiens ou des développeurs, mais bien des soignants sachant utiliser des outils nouveaux. N’oublions pas que les étudiants d’aujourd’hui seront médecins dans dix ans. Il est donc nécessaire de prendre en compte les nouvelles dynamiques à l’œuvre au sein de l’écosystème pour qu’ils soient mieux préparés à leur futur métier. C’est d’ailleurs pour cela que notre symposium est ouvert aux plus jeunes, qui bénéficient d’un tarif préférentiel.

Quels seront les temps forts de cette édition 2022 ?
Le programme de P2M 2022 se divise en plusieurs « blocs » qui reprennent les principaux enjeux liés à la médecine de précision. Allant de l’éthique à la technologie pure, ils permettent de couvrir l’ensemble de ses champs et de donner à voir son écosystème dans son ensemble. À mon sens, cette vision transversale contribuera justement à mieux y préparer les acteurs de la santé. Mais il n’y a pas de temps fort en tant que tel. Ou plutôt, en conviant des experts du monde entier à intervenir sur leur spécialité, chaque temps est pensé comme fort.

En savoir plus sur le site de l’événement.

Article publié dans l'édition de février 2022 d'Hospitalia à lire ici.
 
 






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