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La responsabilité populationnelle à l’essai dans cinq territoires


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Lundi 7 Juin 2021 à 14:43 | Lu 854 fois


Introduit depuis peu dans le vocabulaire sanitaire, le concept de responsabilité populationnelle prévoit la réunion de tous les acteurs d’un territoire pour développer des actions de prévention en santé. Plusieurs expérimentations sont actuellement menées dans cinq régions françaises autour du diabète de type II et de l’insuffisance cardiaque.



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« Sur le plan de la prévention, une personne isolée ne peut y arriver seule. Il faut donc essayer de développer une vision commune sur un territoire donné en impliquant tous les acteurs et en définissant des points précis : profils cliniques, organisation commune… » Partant de ce constat, Antoine Malone, responsable du pôle prospective Europe et international de la Fédération Hospitalière de France (FHF), a développé et théorisé le concept de responsabilité populationnelle.

Afin de faire basculer notre système de santé – inscrit pour l’essentiel dans une stratégie curative et hospitalo-centrée – vers un système préventif et coordonné entre ville et hôpital, cette nouvelle approche impose, notamment, le déploiement de programmes cliniques élaborés par l’ensemble des acteurs de santé d’un territoire. « L’idée n’est pas d’organiser des réunions institutionnelles mais bien de regrouper toutes les personnes concernées », précise le responsable qui a donc développé un modèle pour appuyer la mise en place de cette démarche. Généralisable et adaptable « à toutes pathologies, populations ou territoires », il est actuellement à l’essai dans cinq régions de France : la Cornouaille, le Douaisis, l’Aube et le Sézannais, les Deux-Sèvres et la Haute-Saône.  

Cinq territoires pionniers…

Hôpitaux, médecins, pouvoirs publics, patients, caisses d’assurances maladie… Les différents acteurs de ces territoires s’y sont d’ores et déjà réunis pour aborder ensemble les mesures de prévention à mettre en œuvre à destination des populations atteintes et à risque de diabète de type II et/ou d’insuffisance cardiaque. Dans ces bassins allant de 170 000 à 400 000 habitants, les groupes de travail ont pu se baser sur des pyramides de profils cliniques « réalisées à partir d’une base PMSI et des experts de la pathologie », précise Antoine Malone. Les acteurs mobilisés ont ainsi réfléchi aux différentes mesures à mettre en place en fonction du stade de chacun, échelle de risque ou avancée de la maladie. « L’objectif est alors de garder le plus de personnes possibles dans les strates inférieures de la pyramide », résume le responsable de la FHF.

… et autant de résultats différents

Lors de ces réunions, les structures de chaque zone ont donc eu carte blanche pour développer leurs programmes de prévention autour du diabète de type II et de l’insuffisance cardiaque. Ainsi, dans le Niortais (Deux-Sèvres), en lien avec la caisse primaire d’assurance maladie locale, un dépistage massif des personnes à risque devrait rapidement se mettre en place autour du diabète de type II. En Haute-Saône, pour résoudre les problèmes de rupture de parcours des patients diabétiques qui, après la sortie de l’hôpital, entraînent un arrêt des soins et une aggravation de la maladie, les acteurs locaux ont opté pour la mise en place d’un hôpital de jour « hors les murs », amenant des professionnels hospitaliers, dont un diabétologue, dans des pôles de santé territoriaux. « Ces rendez-vous, plus proches des lieux d’habitation des patients, ont permis de renouer le contact avec des personnes parfois peu assidues à l’hôpital », racontait, en mars dernier dans une conférence SantExpo Live, Perrine Croizier, chargée de mission « responsabilité populationnelle et e-parcours » pour l’ARESPA (Association du Réseau de Santé de Proximité et d’Appui) Haute-Saône.

Les professionnels de santé comme « ambassadeurs »

Dans ce département, comme dans le Niortais, l’une des premières actions du groupe créé dans le cadre du projet Responsabilité populationnelle a également été l’appui à la création d’une Communauté Professionnelle Territoriale de Santé (CPTS), qui devrait apporter une aide indéniable pour passer à la vitesse supérieure : informer et convaincre tous les professionnels de santé afin qu’ils deviennent les « ambassadeurs » de ces programmes de prévention, « qui ne doivent pas souffrir d’inégalité d’accès » comme l’a rappelé Franck Laurens, directeur de la stratégie, des affaires médicales et de la communication au CH de Douai.

De nouveaux besoins SI

Pour aider les professionnels de santé, mais aussi tous les autres acteurs engagés dans cette nouvelle approche territoriale, Antoine Malone en est convaincu : il faudra passer par la résolution de problèmes liés aux systèmes d’information. « Le modèle de responsabilité populationnelle fonctionne, les acteurs de terrain sont venus aux réunions et ils se sont engagés. Cependant, rapidement les enjeux SI sont intervenus à cause de l’échelle des projets [impliquant parfois plus de 10 000 personnes, NDLR] », constate le responsable, alertant par là-même sur la nécessaire communication interprofessionnelle et interdisciplinaire, véritable fil rouge des missions de prévention, de suivi et d’alerte.

« Lorsque l’on aborde une nouvelle organisation, il est toujours nécessaire de s’interroger sur son volet informatique », abonde Cyrille Politi, délégué régional adjoint Bourgogne-Franche-Comté de la FHF. Pour lui, l’évolution des technologies, l’appropriation grandissante de chacun et la demande croissante des nouvelles générations en la matière sont « des atouts » qui facilitent déjà les usages. En banalisant l’utilisation de certaines technologies numériques et en imposant de nouveaux défis, tels que la gestion rapide de grandes masses de données, la crise sanitaire semble elle aussi aller dans ce sens, en offrant de nouveaux outils à la mise en application de larges campagnes de prévention.

Appel pour un engagement massif de l’État

« On ne parle pas de science-fiction, la marche technologique n’est pas si haute ! », résume Antoine Malone. Pour lui, comme pour beaucoup d’autres, si les professionnels et les usagers sont prêts, il manque encore l’appui des pouvoirs publics pour « clarifier les différents dispositifs et appuyer le développement de la responsabilité populationnelle ». « Si l’État s’engageait comme il l’a fait sur le circuit du médicament, par exemple, la responsabilité populationnelle se développerait bien plus vite », ajoute Cyrille Politi. À la frontière entre santé, technologie et questions sociétales, ce concept s’inscrit pourtant dans notre époque et ses enjeux actuels. « Aujourd’hui, tous sont prêts, la société aussi, il n’y a donc plus d’excuses pour ne pas promouvoir ce type de démarche », conclut le délégué régional de la FHF.

Article publié dans le numéro de mai d'Hospitalia à consulter ici






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