Penser l’hôpital pour mieux faire face aux crises
Aurélie Pasquelin
En mettant à mal les modèles sanitaires traditionnels, la pandémie a favorisé une réflexion transversale qui, aujourd’hui plus que jamais, dépasse les seuls murs de l’hôpital. Mais ce dernier n’en reste pas moins le pivot d’une organisation territoriale en réseau. Il doit à ce titre être dès le départ pensé pour être le plus résilient possible et pouvoir ainsi faire rapidement face aux situations de crise. Se saisissant de cet enjeu d’avenir, le CHU de Guadeloupe a mis à profit la construction du futur hôpital pour concevoir une structure agile, capable de s’adapter à plusieurs scénarios possibles.
Incendie, cyclone, épidémie… Ces dernières années ont assurément été mouvementées pour le Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Guadeloupe, dont le bâtiment principal a fêté ses 40 ans en 2020. La dernière crise en date, celle du Covid-19, a d’autant plus mis l’établissement en peine que ses capacités avaient été réduites suite à l’incendie historique du 28 novembre 2017, passant de 600 à 480 lits, dont 22 lits de réanimation pour 450 000 habitants. Manque de lits et donc d’espaces individuels pour isoler les patients, de régimes de pression dans les chambres, de prises d’air pour armer de nouveaux lits de réanimations… l’épidémie de 2020 est venue couronner une situation déjà difficile. Mais les équipes du CHU n’ont pas reculé, s’organisant de manière à affecter 30 % de la capacité de l’établissement aux patients Covid+.
« La seconde vague épidémique a été particulièrement brutale et intense, nous obligeant à transformer trois puis quatre services pour accueillir ces patients », a raconté le Docteur Bruno Jarrige, vice-président de la Commission Médicale d’Établissement (CME) du CHU et directeur médical de la crise Covid, lors d’une conférence organisée par l’agence Architecturestudio le 4 février dernier. Les photos relayées à cette époque par la presse, et montrant des lits de réanimations installés dans le self, ont particulièrement marqué le grand public et montré à tous la nécessité de disposer d’un établissement plus facilement adaptable aux situations de crise.
« La seconde vague épidémique a été particulièrement brutale et intense, nous obligeant à transformer trois puis quatre services pour accueillir ces patients », a raconté le Docteur Bruno Jarrige, vice-président de la Commission Médicale d’Établissement (CME) du CHU et directeur médical de la crise Covid, lors d’une conférence organisée par l’agence Architecturestudio le 4 février dernier. Les photos relayées à cette époque par la presse, et montrant des lits de réanimations installés dans le self, ont particulièrement marqué le grand public et montré à tous la nécessité de disposer d’un établissement plus facilement adaptable aux situations de crise.
Un nouveau bâtiment prévu pour 2023

Un projet co-construit…

… pour un hôpital agile

- Le CHU de Guadeloupe a créé le site internet https://chu-guadeloupe.info dédié à ce nouvel établissement. On peut notamment y voir une vidéo de présentation du projet ainsi que son avancement.
Article publié dans le numéro de mai d'Hospitalia à consulter ici
Le bâtiment hospitalier dans l’imaginaire collectif
De l’hospice à l’hôpital moderne, les bâtiments hospitaliers ont sans cesse évolué au cours de leur histoire, et plus particulièrement depuis le siècle dernier. « Dans l’imaginaire collectif, les établissements de la première partie du XXème siècle pourraient être qualifiés “d’ateliers des médecins”, où les services de soins étaient leur “territoire” », explique Matthieu Sibe, Maître de conférences en Sciences de gestion à l’Institut de Santé Publique, d’Épidémiologie et de Développement de l’Université de Bordeaux, et membre-expert du Haut Conseil de la Santé Publique et de l’Observatoire National Qualité de Vie au Travail des professionnels en santé. Pour lui, ces « ateliers de médecins » ont ensuite été remplacés par un modèle d’hôpital dit d’« usine à soins », lançant une « ère des ingénieurs » inscrite dans une logique industrielle et productive, pour optimiser les flux et standardiser les pratiques. Sur le plan architectural, les exemples les plus marquants de cette période sont certainement les tripodes comme celui de l’hôpital Pellegrin du CHU de Bordeaux, construit dans les années 1970. Aujourd’hui, les formes se simplifient et sont peut-être à mettre en lien avec une nouvelle approche lancée dans les années 2000, celle de « l’ère des “patrons gestionnaires” », basée sur une organisation polaire, le suivi d’indicateurs et une logique de rentabilité.
De l’hospice à l’hôpital moderne, les bâtiments hospitaliers ont sans cesse évolué au cours de leur histoire, et plus particulièrement depuis le siècle dernier. « Dans l’imaginaire collectif, les établissements de la première partie du XXème siècle pourraient être qualifiés “d’ateliers des médecins”, où les services de soins étaient leur “territoire” », explique Matthieu Sibe, Maître de conférences en Sciences de gestion à l’Institut de Santé Publique, d’Épidémiologie et de Développement de l’Université de Bordeaux, et membre-expert du Haut Conseil de la Santé Publique et de l’Observatoire National Qualité de Vie au Travail des professionnels en santé. Pour lui, ces « ateliers de médecins » ont ensuite été remplacés par un modèle d’hôpital dit d’« usine à soins », lançant une « ère des ingénieurs » inscrite dans une logique industrielle et productive, pour optimiser les flux et standardiser les pratiques. Sur le plan architectural, les exemples les plus marquants de cette période sont certainement les tripodes comme celui de l’hôpital Pellegrin du CHU de Bordeaux, construit dans les années 1970. Aujourd’hui, les formes se simplifient et sont peut-être à mettre en lien avec une nouvelle approche lancée dans les années 2000, celle de « l’ère des “patrons gestionnaires” », basée sur une organisation polaire, le suivi d’indicateurs et une logique de rentabilité.