« L’accréditation a été un carcan plus restrictif qu’utile »
Rédaction
En charge du traitement des tests PCR, les biologistes hospitaliers ont participé activement à la lutte contre le Covid-19. Comme les autres spécialités médicales, ils se sont adaptés pour répondre aux enjeux de la crise, ainsi que nous l’explique le Docteur Xavier Palette, président du Syndicat National des Biologistes des Hôpitaux (SNBH).
« Test, test, test », recommandait Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS lors d'une conférence de presse à Genève le 16 mars, alors que la pandémie était en plein essor. Comment les laboratoires de biologie médicale (LBM) français se sont-ils alors adaptés ?
Dr Xavier Palette : Dès l’annonce de premiers cas Covid en France, les LBM hospitaliers ont dû réagir et s’organiser au plus vite pour mettre en place les tests de diagnostic par RT-PCR à partir de prélèvements nasopharyngés. Les Agences Régionales de Santé (ARS) ont donné leur feu vert à l’achat de matériel et de réactifs pour équiper en priorité les plus grosses structures, comme les laboratoires pivots des Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT). Compte tenu de l’ampleur de la vague épidémique qui a déferlé dans certaines régions, les ARS ont dû rapidement autoriser également des laboratoires d’établissements plus petits à pratiquer les tests.
Certains ont tout de même dû attendre plusieurs semaines avant d’être opérationnels…
Face à la demande, les délais de livraison et de mise en route technique ont souvent été retardés pour ceux qui devaient s’équiper dans l’urgence. Nous sommeségalement nombreux à avoir dû faire régulièrement face à des pénuries de réactifsavec la contrainte de devoir sous-traiter les RT-PCR ; certains LBM se sont ainsi tournés vers de plus grosses structures, comme des groupes de laboratoires privés ou comme l’hôpital de La Pitié Salpêtrière en Île-de-France, dont le LBM a été l’un des premiers à être capable de traiter chaque jour un grand nombre de prélèvements. Le volume de demandes que nous recevions était globalement très important. Cette période a donc été particulièrement compliquée pour les biologistes et pour les personnels de nos laboratoires... Ils n’en ont pas moins su être présents et efficaces alors que le défi était de taille.
L’obligation de rendu des résultats dans les 24 heures et l’augmentation du nombre de tests PCR réalisés a forcément eu un impact sur l’organisation des laboratoires hospitaliers. Comment y avez-vous répondu ?
Malgré les tensions, nous avons su répondre à l’urgence de la demande. Beaucoup d’hôpitaux ont pratiqué les tests de dépistage 7j/7 et nos confrères ont souvent travaillé plus de 10 ou 12 heures par jour pendant cette période très tendue. Le nombre des patients suspects d’être infectés par le Covid-19 a nécessité une organisation sécurisée des circuits de prélèvements afin de protéger les personnels de soins et médico-techniques. Nous devions en outre transmettre les résultats au médecin prescripteur ainsi qu’à l’ARS. Cette dernière étape, nécessairement quotidienne puisque les résultats doivent être disponibles au plus tard 24h après le prélèvement, ne se déroule par transmission directe que depuis la fin du confinement. Il est désormais plus aisé de transmettre nos résultats via la plateforme nationale SI-DEP qui informe la Sécurité Sociale, aujourd’hui en charge du suivi des cas contacts.
Ces changements d’organisation auront-ils des conséquences à moyen et long terme ?
Comme pour tous les services et toutes les spécialités médicales, la crise sanitaire risque en effet d’avoir un impact sur le long terme. Face à l’urgence, nombre de procédures et contraintes administratives ont été levées et les personnels hospitaliers dans leur ensemble ont démontré qu’ils pouvaient d’autant plus réagir et se montrer efficaces qu’ils étaient affranchis de ces lourdeurs. Concernant les laboratoires, nous avions demandé au ministre des Solidarités et de la Santé de nous accorder la possibilité de pouvoir reporter ultérieurement les évaluations d’accréditation par le COFRAC, programmées pendant la durée du Plan Blanc. Pour ceux qui se sont retrouvés submergés par la prise en charge des patients Covid, il n’était pas envisageable de faire face aux priorités dictées par la crise sanitaire en demeurant conformes à l’ensemble des exigences de l’accréditation. Ne serait-ce que pour les laboratoires qui ont mis en place les RT-PCR alors qu’ils n’étaient pas accrédités au préalable pour cette méthode analytique...
Cela fait d’ailleurs plusieurs années que le SNBH appelle à revoir en profondeur les modalités de l’accréditation.
Celle-ci se révèle, sur certains points, un carcan plus restrictif qu’utile, trop contraignante et inadaptée à notre exercice médical. Dans les établissements de santé, notamment dans le secteur public hospitalier, elle demande du temps et des effectifs que bien souvent nous n’avons pas. Cet état de fait engendre un véritable mal-être chez les biologistes, qui sont monopolisés pour répondre aux exigences de l’accréditation au détriment de leur métier premier. Nous devrons, à l’avenir, travailler avec le COFRAC pour mettre au point une procédure garantissant la qualité des examens, sans pour autant être contraints à un « tout normatif »vécu par beaucoup de biologistes comme une perte de sens de leur engagement au service des médecins prescripteurs et des patients.
Dr Xavier Palette : Dès l’annonce de premiers cas Covid en France, les LBM hospitaliers ont dû réagir et s’organiser au plus vite pour mettre en place les tests de diagnostic par RT-PCR à partir de prélèvements nasopharyngés. Les Agences Régionales de Santé (ARS) ont donné leur feu vert à l’achat de matériel et de réactifs pour équiper en priorité les plus grosses structures, comme les laboratoires pivots des Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT). Compte tenu de l’ampleur de la vague épidémique qui a déferlé dans certaines régions, les ARS ont dû rapidement autoriser également des laboratoires d’établissements plus petits à pratiquer les tests.
Certains ont tout de même dû attendre plusieurs semaines avant d’être opérationnels…
Face à la demande, les délais de livraison et de mise en route technique ont souvent été retardés pour ceux qui devaient s’équiper dans l’urgence. Nous sommeségalement nombreux à avoir dû faire régulièrement face à des pénuries de réactifsavec la contrainte de devoir sous-traiter les RT-PCR ; certains LBM se sont ainsi tournés vers de plus grosses structures, comme des groupes de laboratoires privés ou comme l’hôpital de La Pitié Salpêtrière en Île-de-France, dont le LBM a été l’un des premiers à être capable de traiter chaque jour un grand nombre de prélèvements. Le volume de demandes que nous recevions était globalement très important. Cette période a donc été particulièrement compliquée pour les biologistes et pour les personnels de nos laboratoires... Ils n’en ont pas moins su être présents et efficaces alors que le défi était de taille.
L’obligation de rendu des résultats dans les 24 heures et l’augmentation du nombre de tests PCR réalisés a forcément eu un impact sur l’organisation des laboratoires hospitaliers. Comment y avez-vous répondu ?
Malgré les tensions, nous avons su répondre à l’urgence de la demande. Beaucoup d’hôpitaux ont pratiqué les tests de dépistage 7j/7 et nos confrères ont souvent travaillé plus de 10 ou 12 heures par jour pendant cette période très tendue. Le nombre des patients suspects d’être infectés par le Covid-19 a nécessité une organisation sécurisée des circuits de prélèvements afin de protéger les personnels de soins et médico-techniques. Nous devions en outre transmettre les résultats au médecin prescripteur ainsi qu’à l’ARS. Cette dernière étape, nécessairement quotidienne puisque les résultats doivent être disponibles au plus tard 24h après le prélèvement, ne se déroule par transmission directe que depuis la fin du confinement. Il est désormais plus aisé de transmettre nos résultats via la plateforme nationale SI-DEP qui informe la Sécurité Sociale, aujourd’hui en charge du suivi des cas contacts.
Ces changements d’organisation auront-ils des conséquences à moyen et long terme ?
Comme pour tous les services et toutes les spécialités médicales, la crise sanitaire risque en effet d’avoir un impact sur le long terme. Face à l’urgence, nombre de procédures et contraintes administratives ont été levées et les personnels hospitaliers dans leur ensemble ont démontré qu’ils pouvaient d’autant plus réagir et se montrer efficaces qu’ils étaient affranchis de ces lourdeurs. Concernant les laboratoires, nous avions demandé au ministre des Solidarités et de la Santé de nous accorder la possibilité de pouvoir reporter ultérieurement les évaluations d’accréditation par le COFRAC, programmées pendant la durée du Plan Blanc. Pour ceux qui se sont retrouvés submergés par la prise en charge des patients Covid, il n’était pas envisageable de faire face aux priorités dictées par la crise sanitaire en demeurant conformes à l’ensemble des exigences de l’accréditation. Ne serait-ce que pour les laboratoires qui ont mis en place les RT-PCR alors qu’ils n’étaient pas accrédités au préalable pour cette méthode analytique...
Cela fait d’ailleurs plusieurs années que le SNBH appelle à revoir en profondeur les modalités de l’accréditation.
Celle-ci se révèle, sur certains points, un carcan plus restrictif qu’utile, trop contraignante et inadaptée à notre exercice médical. Dans les établissements de santé, notamment dans le secteur public hospitalier, elle demande du temps et des effectifs que bien souvent nous n’avons pas. Cet état de fait engendre un véritable mal-être chez les biologistes, qui sont monopolisés pour répondre aux exigences de l’accréditation au détriment de leur métier premier. Nous devrons, à l’avenir, travailler avec le COFRAC pour mettre au point une procédure garantissant la qualité des examens, sans pour autant être contraints à un « tout normatif »vécu par beaucoup de biologistes comme une perte de sens de leur engagement au service des médecins prescripteurs et des patients.
À Béziers, des tensions sur les réactifs et des PCR au départ sous-traités
Julien Obiols, responsable du laboratoire de biologie médicale du CH de Béziers. ©DR
« En une semaine, nous avons eu des extracteurs parfois demandés depuis un an »
Jean-Paul Feugeas, président du SNMBCHU. ©DR
Aux Hospices Civils de Lyon, « nous avons connu un état de grâce administratif »
Louis Lacaille, praticien hospitalier aux Hospices Civils de Lyon. ©DR
Article publié sur le numéro de juin d'Hospitalia à consulter ici : https://www.hospitalia.fr/Hospitalia-49-Special-Covid-19-MERCI-_a2230.html