Rédaction
Le CHU de la Réunion est né de la fusion du Groupe Hospitalier Sud Réunion (GHSR) et du Centre Hospitalier Félix Guyon situé au nord de l’île. Ces deux établissements ont d’abord formé le CHR de la Réunion, avec un siège administratif à Saint-Paul. Sa vocation universitaire s’est ensuite concrétisée par la signature d’une convention constitutive le 29 février 2012, marquant ainsi la création du 30ème et du dernier en date des CHU français - un évènement rare qui n’était pas arrivé depuis les années 70 ! Du point de vue informatique, cette opération n’était pas envisageable sans la mise en place préalable d’un Système d’Information administratif et de production de soins unique. La continuité de la prise en charge et l’accès facilité aux soins pour tous les patients de l’île, d’un côté, et la vision continue et partagée de la prise en charge pour tous les professionnels, de l’autre, constituaient l’objectif prioritaire de ce projet.
Comment l’établissement et ses équipes ont pu relever le défi d’une fusion malgré l’éloignement géographique et les contraintes techniques ? Les explications de l’équipe projet (Éric Maillet, Responsable Informatique, Docteurs Olivier Fels et Michel Bohrer, Médecins DIM, et Mme Li-Moï Lung-Yut-Fong, Chef de projet fusion CrossWay Hôpital).
En parallèle, les équipes informatiques s’interrogent sur la meilleure façon d’appréhender la fusion du point de vue technique. Différentes options ont été étudiées, via un audit conduit par McKesson en 201 : fallait-il fusionner les SI, ou garder deux SI indépendants avec, au milieu, un portail pour le partage des données communes ? « Nous nous sommes rapidement rendus à l’évidence qu’un Système d’Information unique serait la solution la
plus adéquate, déclare Éric Maillet. Un dossier commun apporte en effet une plus value importante : facilité de communication des données, partage du dossier médical malgré l’éloignement géographique, mise en commun des ressources, mutualisation des moyens humains et matériels », précise-t-il.

C’est ensuite la partie facturation qui a été fusionnée sous forte contrainte de délai pour finaliser la bascule avant le 1er janvier 2012 et la clôture de l’exercice antérieur. Grâce aux moyens mis en œuvre par les équipes des centres hospitaliers et de McKesson, le chantier préparatoire a été finalisé dans les temps. Le 29 février 2012, le CHU de la Réunion est né.
Pour mettre toutes les chances de son côté, une organisation multi partite a été instaurée, rassemblant le CHU, McKesson et le MiPih autour d’un pilotage commun. Côté CHU, le projet a dynamisé la coopération des équipes sud et nord, avec la création d’équipes mixtes du DIM, la fusion progressive des services informatiques et un investissement fort de la Direction Générale. De même, McKesson déploie tous les moyens nécessaires à la fois pour constituer une équipe renforcée sur le terrain et pour fournir à temps tous les livrables spécifiques.
Il s’agissait, concrètement, de répartir le travail en sous-projets fondamentaux, tels que la refonte du fichier « structures » et la renumérotation des UF historiques. Plusieurs sous-projets ont ainsi été menés en parallèle. Des serveurs dédiés et la fibre optique à haut débit ont été installés pour anticiper tout éventuel problème de performance.
Même si la plupart des réunions et de séances de travail ont pu se dérouler à distance, une collaboration de proximité a été incontournable. « Nous avons organisé des « marathons » pendant lesquels tous les acteurs étaient physiquement présents au même endroit durant une semaine entière bloquée exclusivement pour le projet. Ce fut la véritable clé de succès de l’opération », raconte Li-Moï Lung-Yut-Fong.
« Un des enjeux techniques concernait la fusion des tables, identiques dans les 2 bases de données de CrossWay Hôpital. Pour certaines, la suppression des doublons était nécessaire. Pour d’autres, il fallait concaténer les données (par exemple, pour les tables des rendez-vous). Enfin, des fusions partielles devaient être opérées pour une partie des tables. McKesson a accompagné le CHU tout au long de ce processus et a mené un travail essentiel de création d’outils spécifiques d’analyse et de migration. Cet investissement très important en développements ad hoc a confirmé l’engagement fort de McKesson à nos côtés », ajoute le Dr. Bohrer.

« Au-delà des grands pans fonctionnels, quelques petites différences persistaient. Notre stratégie était de prendre le meilleur sur les 2 sites. Ainsi, le CHU a bénéficié de quelques « petits plus » en termes de fonctionnalités mises en œuvre sur un site ou sur l’autre, sans que cela remette en cause la cohérence de l’ensemble », précise Mme Lung-Yut-Fong.
Outre sa complexité inhérente, le projet a par ailleurs fait face à des difficultés « naturelles », à commencer par l’éloignement géographique des hôpitaux nord et sud (distants de 80 km) et leur situation dans une région à risque cyclonique. Pour anticiper ces risques, la mise en place des réseaux sécurisés a été indispensable. Pour McKesson, la variable « météo » n’était pas non plus à négliger : les déplacements des chefs de projets devaient parfois être anticipés pour tenir compte d’éventuelles alertes cycloniques ! Sans parler de 2 à 3 heures de décalage horaire pour les équipes Support restées en métropole en veille.
La fusion des bases de CrossWay Hôpital a néanmoins été menée avec succès en février 2012. Quatre tests à blanc ont été effectués au préalable avec différents niveaux d’essai : le dossier patient CrossWay seul, la gestion administrative seule, puis les deux applications avec l’intégration. L’opération « big bang », couronnée de succès et touchant l’ensemble des logiciels utilisés par le CHU, fut le fruit des efforts concentrés sur la fusion pendant près de 2 ans.

contribution des équipes du Dr Jean-Fabien Rouanet, DIM au GHSR qui, malheureusement, nous a quitté brutalement quelques mois seulement après la fusion », déclare le Dr. Fels.
Le dossier patient CrossWay fusionné a rapidement conquis les utilisateurs et a remporté l’adhésion générale. « Le projet a été très apprécié des équipes soignantes car il a répondu à plusieurs attentes fortes. L’historique de la prise en charge des patients est aujourd’hui à leur disposition concernant l’ensemble des séjours, qu’ils aient eu lieu au sud ou au nord, et ce, de façon chronologique. Il en va de même pour l’accès aux résultats d’imagerie et de laboratoire. Cela apporte une transparence accrue et favorise la coopération entre les professionnels – garantes d’une prise en charge médicale de qualité pour les patients », poursuit le Dr Bohrer.
La fusion n’est pas une opération ponctuelle, aussi faut-il assurer la longévité du nouveau Système d’Information. La DSIO et le DIM ont donc dû mettre en place une nouvelle organisation pour répondre à cette exigence. Ils partagent désormais le même toit, ce qui permet de mutualiser les compétences.
L’étape suivante consistait à migrer le dossier patient CrossWay en version 7.0, très attendue par les professionnels car elle devait amener le DPI à un nouveau palier de qualité et de richesse fonctionnelle. Mais cette migration ne pouvait pas intervenir avant la fusion : il était en effet plus prudent de fusionner sur la base de la version 3.0, stable et bien connue des utilisateurs. Le CHU a, par la suite, migré en version 7.0 pendant le premier weekend de février 2013, soit un an seulement après la fusion des bases de données.
Ce projet a été mené selon la même méthodologie qui a fait ses preuves lors de la fusion. La migration en version 7 a ainsi permis au plus « jeune » des CHU français d’envisager de nouveaux projets, notamment le déploiement de la prescription médicamenteuse dans les services du GHSR.
Le prochain jalon sera la fusion des bases de la solution UrQual des sites nord (démarré en 2006) et sud (démarré en 2008), ainsi que son intégration avec le dossier patient CrossWay Hôpital. Cette intégration permettra une coopération renforcée entre tous les professionnels de santé qui prennent en charge les patients accueillis par le service des urgences (plus de 123 00 passages par an). De plus, elle consolidera le rôle du dossier patient CrossWay Hôpital comme une véritable pierre angulaire pour tous les serveurs de résultats. Parmi d’autres projets en cours d’étude et de planification, la mise en place de M-PMSI pour optimiser le codage et améliorer les recettes de l’établissement. La messagerie sécurisée de santé et la diffusion de documents vers la médecine de ville font également partie des priorités. Alors, nul doute, l’année 2014 sera pleine de nouveaux défis à relever !