Covid-19 : paroles d’hygiénistes hospitaliers
Rédaction
Pour le Docteur Thierry Lavigne, responsable médical de l’Équipe Opérationnelle d’Hygiène Hospitalière des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, « cette crise a montré l’importance de la prise en compte du risque infectieux ». Rencontre.
Le CHRU de Strasbourg a rapidement été au centre de la zone épidémique. Avez-vous néanmoins pu vous préparer ?
Thierry Lavigne : Participant au réseau régional Risque Épidémique et Biologique (REB), notre service avait relancé le maintien des compétences en matière de prise en charge de patients de type REB au travers de formations habillage et déshabillage. Une réunion de notre comité de pilotage avait été organisée en début d’année. Nous avions entendu parler du Covid-19 et lu la première fiche alerte du COREB. Nous n’avions certes pas prévu une telle brutalité dans la vague épidémique, mais le travail effectué en amont a largement permis de mettre en place les mesures adéquates au sein de l’établissement. Nous avons rapidement transformé un groupe de travail réuni pour préparer une extension forte de l’épidémie, en cellule de crise afin de réorganiser l’hôpital, mais aussi informer et former les équipes. Les quinze premiers jours ont été particulièrement stressants. Plusieurs services et cadres de santé étaient en difficulté. Il n’était pas rare qu’ils contactent les équipes d’hygiène à toute heure du jour ou de la nuit pour avoir des conseils, ou pour nous demander de débloquer des stocks d’Équipements de Protection Individuels (EPI).
Ces équipements ont été en tension partout en France. Comment avez-vous géré la pénurie ?
Il a fallu constamment s’adapter et surtout expliquer que la réduction de certaines allocations d’équipements était liée à l’évolution de nos connaissances sur le virus et non à la pénurie. Pour le reste, quand les EPI étaient nécessaires et que nous allions en manquer, nous avons dû chercher des alternatives. Par exemple, pour les sur-blouses, nous avons testé des équipements en plastique prédécoupé, mais avons aussi investi dans des sur-blouses en tissu. Nous avons également fait laver en blanchisserie des équipements à usage unique pour pouvoir les réutiliser... À chaque fois, il a fallu expliquer la démarche aux équipes et faire preuve de transparence.
Allez-vous continuer à utiliser les équipements textiles acquis au plus fort de la crise ?
Le CHU a acheté 37 000 blouses en tissu. Nous allons donc certainement les réutiliser, mais dans certains cas et sous certaines conditions. Chaque type de produit bénéficie d’avantages comme d’inconvénients. Le travail des équipes d’hygiène sera donc d’organiser l’usage et la distribution de ces équipements, suivant les contextes et les besoins de chacun.
Justement, comment appréhendez-vous le « retour à la normale » ?
C’est en fin de compte le deuxième volet de la gestion de crise. Après la vague, il faut réorganiser l’hôpital, reprendre les activités, en y incluant le risque d’un retour du virus. Notre service est très sollicité dans cette étape primordiale, qui concerne autant la réorganisation du circuit des patients que celle des flux au sein des services. En tout état de cause, cette crise a montré l’importance de la prise en compte du risque infectieux, à l’hôpital comme dans la société. Beaucoup ont aussi redécouvert la nécessité d’avoir le temps de décontaminer et de nettoyer. Même si le message ne restera pas indéfiniment gravé dans les esprits, j’espère qu’il sera présent pendant de nombreuses années.
Thierry Lavigne : Participant au réseau régional Risque Épidémique et Biologique (REB), notre service avait relancé le maintien des compétences en matière de prise en charge de patients de type REB au travers de formations habillage et déshabillage. Une réunion de notre comité de pilotage avait été organisée en début d’année. Nous avions entendu parler du Covid-19 et lu la première fiche alerte du COREB. Nous n’avions certes pas prévu une telle brutalité dans la vague épidémique, mais le travail effectué en amont a largement permis de mettre en place les mesures adéquates au sein de l’établissement. Nous avons rapidement transformé un groupe de travail réuni pour préparer une extension forte de l’épidémie, en cellule de crise afin de réorganiser l’hôpital, mais aussi informer et former les équipes. Les quinze premiers jours ont été particulièrement stressants. Plusieurs services et cadres de santé étaient en difficulté. Il n’était pas rare qu’ils contactent les équipes d’hygiène à toute heure du jour ou de la nuit pour avoir des conseils, ou pour nous demander de débloquer des stocks d’Équipements de Protection Individuels (EPI).
Ces équipements ont été en tension partout en France. Comment avez-vous géré la pénurie ?
Il a fallu constamment s’adapter et surtout expliquer que la réduction de certaines allocations d’équipements était liée à l’évolution de nos connaissances sur le virus et non à la pénurie. Pour le reste, quand les EPI étaient nécessaires et que nous allions en manquer, nous avons dû chercher des alternatives. Par exemple, pour les sur-blouses, nous avons testé des équipements en plastique prédécoupé, mais avons aussi investi dans des sur-blouses en tissu. Nous avons également fait laver en blanchisserie des équipements à usage unique pour pouvoir les réutiliser... À chaque fois, il a fallu expliquer la démarche aux équipes et faire preuve de transparence.
Allez-vous continuer à utiliser les équipements textiles acquis au plus fort de la crise ?
Le CHU a acheté 37 000 blouses en tissu. Nous allons donc certainement les réutiliser, mais dans certains cas et sous certaines conditions. Chaque type de produit bénéficie d’avantages comme d’inconvénients. Le travail des équipes d’hygiène sera donc d’organiser l’usage et la distribution de ces équipements, suivant les contextes et les besoins de chacun.
Justement, comment appréhendez-vous le « retour à la normale » ?
C’est en fin de compte le deuxième volet de la gestion de crise. Après la vague, il faut réorganiser l’hôpital, reprendre les activités, en y incluant le risque d’un retour du virus. Notre service est très sollicité dans cette étape primordiale, qui concerne autant la réorganisation du circuit des patients que celle des flux au sein des services. En tout état de cause, cette crise a montré l’importance de la prise en compte du risque infectieux, à l’hôpital comme dans la société. Beaucoup ont aussi redécouvert la nécessité d’avoir le temps de décontaminer et de nettoyer. Même si le message ne restera pas indéfiniment gravé dans les esprits, j’espère qu’il sera présent pendant de nombreuses années.
À Monaco, pas de vague mais un stress latent

Olivia Keita-Perse, cheffe du service épidémiologie et hygiène hospitalière du Centre Hospitalier Princesse Grace de Monaco. ©DR
Au CHU Dijon-Bourgogne, « notre rôle est aussi de rationaliser l’usage des mesures barrières »

Ludwig-Serge Aho-Glélé, responsable du service d'épidémiologie et d'hygiène hospitalière du CHU Dijon-Bourgogne. ©DR
Article publié sur le numéro de juin d'Hospitalia à consulter ici : https://www.hospitalia.fr/Hospitalia-49-Special-Covid-19-MERCI-_a2230.html