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Au CH de Bligny, une stratégie numérique entre sécurité et innovation


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Lundi 17 Novembre 2025 à 19:48 | Lu 51 fois


À Briis-sous-Forges, au cœur de l’Essonne, le Centre Hospitalier de Bligny mise sur une stratégie numérique ambitieuse pour moderniser ses services, renforcer sa cybersécurité et soutenir la recherche. Arnaud Dolin, directeur des systèmes d’information (DSI), et Jean-Louis Di Tommaso, directeur général, détaillent, pour Hospitalia, les grands projets qui transformeront l’établissement d’ici à 2030.



© CH de Bligny
Pourriez-vous, pour commencer, nous présenter le Centre hospitalier de Bligny ? 

Jean-Louis Di Tommaso : Fondé en 1900, le CH de Bligny est une association-loi 1901, qui compte 350 lits et 24 places, dont 120 en court séjour de médecine. Installé dans un parc de 85 hectares en Essonne, l’établissement ne pratique ni chirurgie ni obstétrique, mais couvre un large spectre médical, allant de la médecine aux soins médicaux et de réadaptation (SMR), en passant par des spécialités telles que la pneumologie, l’oncologie, l’hématologie, la cardiologie, les maladies infectieuses et la diabétologie. Nous disposons également d’une unité de soins palliatifs et d’un hôpital de jour de chimiothérapie. Avec près de 650 collaborateurs et environ 18 000 consultations par an, l’hôpital s’appuie sur une pharmacie à usage intérieur dotée d’une unité de reconstitution des chimiothérapies, d’une équipe de psychopathologie, ainsi qu’un laboratoire externalisé mais toujours présent sur site pour une partie de ses activités.  

Quelle est aujourd’hui la stratégie numérique de l’établissement ? 

Jean-Louis Di Tommaso : Actuellement, trois principaux chantiers structurent notre démarche : sécuriser nos infrastructures, moderniser nos logiciels métiers et développer la recherche. Nous avons ainsi lancé un plan de sécurisation sur cinq ans, couvrant à la fois l’informatique et la protection physique du site, en vue notamment de notre certification prévue en 2026. Depuis deux ans, sous l’impulsion d’Arnaud Dolin, la DSI a consolidé l’infrastructure en passant progressivement d’une gestion interne des serveurs à une externalisation partielle, tout en renforçant les liaisons fibres pour fiabiliser les accès. Cette base solide ouvre désormais la voie à l’évolution de nos outils numériques et à leur valorisation pour la recherche.  

Arnaud Dolin : La connectivité a longtemps été un défi, étant donné les spécificités géographiques du site. Mais l’arrivée et le doublement du tracé de la fibre ainsi que la mise en place d’un back-up satellitaire garantissent désormais une continuité de service. Cela nous permet d’externaliser certaines applications non sensibles, comme la gestion des plannings, et de migrer vers des solutions proposées en mode SaaS. Bien qu’il soit parfois plus coûteux, ce modèle offre un avantage décisif, avec des mises à jour continues et transparentes, là où notre dossier patient informatisé (DPI) actuel impose plusieurs heures d’interruption à chaque évolution.

La cybersécurité semble être un pilier central de cette stratégie… 

Arnaud Dolin : Absolument, car la question n’est plus « si » nous serons attaqués, mais « quand ». Comme tous les établissements de santé, nous sommes exposés et devons être prêts. C’est pourquoi, avec notre RSSI, nous assurons une vigilance constante en nous appuyant notamment sur les recommandations du CERT Santé, référence nationale en la matière. Les enjeux sont considérables, puisqu’il s’agit, d’abord et surtout, de garantir la résilience de notre système d’information et de renforcer la protection de nos dispositifs et données sensibles. 

Quels sont vos prochains chantiers numériques prioritaires ? 

Arnaud Dolin : Le remplacement du DPI est l’un de nos principaux projets des cinq prochaines années. L’outil actuel arrive en fin de vie, et son renouvellement représente une opération structurante. Un audit est en cours pour identifier la solution la mieux adaptée à nos besoins. En parallèle, nous poursuivons la transformation numérique côté patients, avec par exemple la mise en place prochaine de la préadmission en ligne, une pratique déjà largement répandue ailleurs. Notre ambition n’est pas d’innover pour innover, mais de hisser Bligny au standard attendu aujourd’hui, dès 2026. 

Vous envisagez également la création d’un entrepôt de données
Arnaud Dolin : Oui. Aujourd’hui, nos données sont dispersées entre différents logiciels et donc peu exploitables. L’objectif est de bâtir un entrepôt capable de collecter, centraliser et agréger ces informations, pour en tirer parti notamment dans le domaine de la recherche. Mais un tel projet demande du temps. D’ailleurs, dans d’autres établissements, il a fallu parfois sept à huit ans pour le déployer. Nous avançons donc pas à pas, en commençant par une analyse fine de nos besoins et des solutions du marché. 

Vous travaillez actuellement sur votre projet d’établissement 2026-2030. Quelle place y occupera le numérique ? 

Jean-Louis Di Tommaso : Le numérique est au cœur de notre futur projet, notamment avec l’intégration progressive de l’intelligence artificielle. Nous réfléchissons collectivement à la façon manière dont nous pourrions la déployer et surtout à son apport concret, en lien direct avec l’entrepôt de données. Cette orientation s’inscrit dans une feuille de route à cinq ans, en cohérence avec la stratégie numérique nationale.  

L’intelligence artificielle peut-elle trouver d’autres usages à l’échelle de l’hôpital ? 

Arnaud Dolin : Nous testons déjà certaines fonctionnalités d’IA, par exemple pour l’optimisation des plannings. Mais il est encore trop tôt pour un déploiement massif. L’accès aux outils est facile, mais l’essentiel est de cadrer leur usage, de sensibiliser les équipes pour éviter des dérives, et de définir clairement leur valeur ajourée pour les soins et l’organisation hospitalière. 

Jean-Louis Di Tommaso : L’IA offre des perspectives intéressantes, mais elle doit être intégrée avec prudence et discernement. Bien utilisée, elle pourra soutenir nos activités de recherche tout en accompagnant l’exercice quotidien des professionnels de santé et en améliorant la qualité des soins. C’est dans cet équilibre entre innovation technologique et sécurité des pratiques que le CH de Bligny prépare l’avenir. 

> Article paru dans Hospitalia #70, édition de septembre 2025, à lire ici 

 




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